Adieu au Langage - 3D

La nature, à laquelle il ajoute le monde animal, et surtout son chien Roxy, mais aussi le couple, dans son intimité : Jean-Luc Godard, inlassable artisan et chercheur, retrouve ici des motifs qu’il connaît bien. Adieu au langage est un montage-collage-mixage, comme chacun de ses films désormais.

La nouveauté est dans l’utilisation de la 3D. Le cinéaste a toujours expérimenté - il fut un pionnier de l’utilisation de la vidéo dans les années 1970. Mais il utilise le dispositif 3D de façon inventive, non-spectaculaire. Il multiplie les appareils, smartphones, appareils photo, Go-pro… et s’affranchit des règles, le relief devenant parfois surimpression. Filmant ainsi son quotidien, jouant des profondeurs de champ, le cinéaste "chercheur de formes" utilise l’outil technologique pour l’amener à lui, à la poésie. Les couleurs saturées amènent, elles, le film vers l’expérimental.

Adieu au langage prend parfois la forme d’un film de vacances, l’auteur filmant son environnement à Rolle, près du lac Léman, et son chien, comme un repli sur la sphère privée. Certains y verront une valeur testimoniale.

« La brièveté du film, comme l’agressivité avec laquelle il sollicite nos rétines, nous laisse au fond le même souvenir que celui d’un rêve, sauf que comme « chacun croit que le rêveur c’est l’autre », aucun spectateur n’en conservera les mêmes souvenirs que son voisin. Sans doute, pourtant, les images les plus entêtantes du film sont aussi celles qui travaillent sur des motifs aussi rebattus qu’un simple « coucher de soleil à travers une fenêtre », image inspiratrice captée en direct depuis la chambre claire des quatre murs de l’atelier godardien. Ou plutôt depuis son ermitage, musée mental et sensitif dont les recoins n’ont pas fini de délivrer leurs surprises. » (Joachim Lepastier, Cahiers du cinéma n°701, juin 2014)