D’un film à l’autre

À l’occasion des 50 ans de sa société de production Les Films 13, Claude Lelouch, 73 ans, souhaite réaliser un film de famille, destiné à ses enfants, à son équipe et à tous ceux qui l’ont entouré dans son travail. « J’ai cherché les moments où j’ai été dépassé, étonné de ce qui arrivait : parfois, sur un tournage, la lumière, la technique, l’humeur des acteurs ont une harmonie miraculeuse. Je suis un metteur en scène de l’humeur. Bonne ou mauvaise, c’est cette météo qui fait le charme des gens, qui crée la surprise. On peut la capter, mais on ne la maîtrise pas plus que le soleil ou la pluie. Il faut déguster ces moments imprévisibles. »

Après avoir réalisé un montage, il décide de l’offrir aussi au grand public. Anthologie des productions Films 13 depuis les années 1960 (courts et longs métrages écrits et réalisés pour l’essentiel par lui), D’un film à l’autre retrace un demi-siècle de cinéma, allant du Propre de l’homme (1961) à Ces amours-là (2010). Témoignage d’un réalisateur autodidacte qui se penche sur lui-même et rend hommage, de manière chronologique, à tous ceux qui l’ont accompagné : acteurs, auteurs, compositeurs de musique, coproducteurs… Des retrouvailles d’Anouk Aimée et Jean-Louis Trintignant à la leçon de rhétorique de Jean-Paul Belmondo à Richard Anconina…

Dès les premières images, une traversée de Paris dans une voiture lancée à pleine vitesse, filmée en un seul plan avec caméra embarquée, un matin de l’été 1976. C’est son court métrage C’était un rendez-vous. Ce plan-séquence spectaculaire, le cinéaste le reconnaît comme une métaphore de son parcours : « C’est un peu comme cette auto que j’ai mené ma carrière au cinéma ». Plein de fougue, et gouverné par une soif de mouvement et un goût du risque.

« Après la mort de Truffaut puis de Sautet, il tient le haut du pavé de l’étude sentimentale, du couple et de la fascination pour la gent féminine dont il tira quelques-uns des plus beaux portraits. Celui d’Anouk Aimée évidemment, mais aussi d’Annie Girardot, de Françoise Fabian, de Catherine Deneuve et de toutes les autres, celles qu’il filme dans une ronde d’amour, un tourbillon de la caméra, une valse qui est encore maintenant sa signature. » (Nicolas Bauche, Positif n°603, mai 2011)