Quand les journalistes Serge Kaganski et Jean-Marc Lalanne lui demandent comment il procède pour agencer toutes ses images, Jean-Luc Godard répond : « Il n’y a pas de règles. Ça tient de la poésie, ou de la peinture, ou des mathématiques. De la géométrie à l’ancienne surtout. L’envie de composer des figures, de mettre un cercle autour d’un carré, de tracer une tangente. C’est de la géométrie élémentaire. Si c’est élémentaire, il y a des éléments. Alors je montre la mer… Voilà, ce n’est pas vraiment descriptible, ce sont des associations. Et si on dit association, on peut dire socialisme. » (Les Inrockuptibles, 12 mai 2010).
Film socialisme, qui, comme tous les films de Godard, avait son titre bien avant d’exister, est un essai en forme de collage polymorphe, que certains ont vu comme une nouvelle oraison du cinéaste-pythie.
Il y a un paquebot de croisière avec ses passagers parlant toutes les langues. Une collectivité sur l’eau, des bribes de conversations, des réflexions fugaces. Les images s'enchaînent à un rythme infernal, le son (la mer et le vent, la machinerie, la musique) est saturé : étourdissant. Et des images extraordinaires de la mer, de l’écume, et du pont bleu et jaune. Puis, une histoire familiale et politique, celle des Martin, dans un garage automobile. Enfin un retour aux villes de légendes et de révoltes.
Que peut-on encore faire au cinéma ? Godard répond : tout. Il juxtapose, mêle, fait s’entrechoquer images documentaires ou fictionnelles, trouvées sur Internet, à la télévision, tournées par lui ou par d’autres. Entre politique, quotidien, poésie et philosophie, Film socialisme parle de son époque et de l’Europe, ce continent dont Godard dit « qu’il ne veut pas mourir sans l’avoir revu heureux ».
Déstabilisant dans sa forme, qui est devenue depuis plusieurs années la signature de son auteur, l’elliptique Film socialisme parle par aphorismes. À chacun de se laisser porter ou pas, la démarche du spectateur est ici éminemment personnelle. Celle de Godard est, elle, contemporaine. « Le cinéaste réussit ce paradoxe, sans toujours donner l’heure juste, être de son temps. » (Cyril Beghin, Cahiers du cinéma n°657, juin 2010)
Film socialisme
Suisse, France, 2010, 1h42, couleurs, format 1.78
Réalisation & scénario : Jean-Luc Godard
Photo : Fabrice Aragno, Paul Grivas
Production : Ruth Waldburger, Alain Sarde, Vega Film, Office Fédéral de la Culture, TSR, Ville de Genève, Suissimage, Fonds Régio Films, Fondation Vaudoise, George Foundation, Wild Bunch, Canal +
Interprètes : Catherine Tanvier (la mère), Christian Sinniger (le père), Jean-Marc Stehlé (Otto Goldberg), Agatha Couture (Alissa), Marie-Christine Bergier (Frieda von Salomon), Nadège Beausson-Diagne (Constance), Mathias Domahidy (Mathias), Quentin Grosset (Lucien), Olga Riazanova (Olga), Maurice Sarfati, Dominique Devals, Louma Sanbar, Gulliver Hecq (Lucien), Marine Battaggia (Florine), Élisabeth Vitali (la journaliste FR3), Eye Haidara (la camérawoman de FR3), Patti Smith, Lenny Kaye, Alain Badiou, Elias Sanbar, Bernard Maris, Robert Maloubier (dans leurs propres rôles)
Présentation au Festival de Cannes : 17 mai 2010
Sortie en France : 19 mai 2010
Ce site nécessite l'utilisation d'un navigateur internet plus récent. Merci de mettre à jour votre navigateur Internet Explorer vers une version plus récente ou de télécharger Mozilla Firefox. :
http://www.mozilla.org/fr/firefox