House by the River

Après avoir fui le nazisme dans les années 1930 en Allemagne, Fritz Lang, exilé aux États-Unis, devient citoyen américain en 1935. Il tourne des films réalistes et sociaux, des westerns, des films d’espionnage… House by the River est un film noir, malheureusement non distribué en France à l’époque.  Le public hexagonal ne le découvrira qu’à la toute fin des années 1970, à la télévision, grâce au cinéphile Patrick Brion.

Bien que n’étant pas crédité au scénario, Fritz Lang, adaptant le roman éponyme d’A.P. Herbert, travaille minutieusement son récit et soigne chaque détail.  « Au cinéma, la spontanéité, comme l’atmosphère, ne peut naître que d’une accumulation de détails. » (Fritz Lang in Fritz Lang, Lotte H.Eisner, Cahiers du cinéma/Cinémathèque française)

Tout est symbolique dans l'univers de Lang : le superflu n’y a pas sa place et chaque mouvement de caméra doit avoir une raison d’être. Dans House by the River, le spectateur voit l’action du point de vue du meurtrier, afin de s’identifier à lui et de souffrir à ses côtés. Au tout début du film, Stephen remet avec soin un scarabée dans l’herbe - il ne ferait pas de mal à un insecte. C’est pourtant le même qui, un instant plus tard, va tuer un être humain. Nous sommes tous des assassins en puissance et Fritz Lang montre le mécanisme de la culpabilité. « Je suis arrivé à la conclusion que l’esprit de chaque homme cache une impulsion latente pour le crime. » (Fritz Lang).

House by the River est une œuvre nocturne, accentuée par des jeux de clairs-obscurs où les personnages deviennent des ombres fantomatiques. La sombre atmosphère gothique est renforcée par la présence inquiétante de la rivière toute proche. Le destin de Stephen est lié à l’eau du fleuve, il en est prisonnier, c’est une eau, qui revient toujours, charriant la même pourriture.

« House by the river, se distingue de L'Invraisemblable Vérité par l’onirisme de l’atmosphère ; on voudrait pouvoir revenir en arrière, comme dans ces rêves dont on prévoit la fin, revenir à cette paix étonnante qui imprègne les premiers plans du film, un soir d’été, près de la rivière ; l’angoisse naît plus de la tendresse que de la cruauté… » (Bertrand Tavernier, Cahiers du cinéma n°132, juin 1962)