La Passante du Sans-Souci

« Je crois que La Passante du Sans-Souci se rapproche de mon premier film : L’Horizon. C’est une œuvre entièrement fondée sur les rapports entre les gens, un certain goût de la litote et une manière directe de s’exprimer. Les personnages disent ce qu’ils ressentent, sans calcul. » (Jacques Rouffio). Réalisé en 1967, L’Horizon est une réflexion sur la tentation de la désertion et le portrait de la vie – ou ce qu’il en restait – dans les tranchées de la Première Guerre mondiale.

Quinze ans plus tard, à la demande de Romy Schneider, Jacques Rouffio et Jacques Kirsner adaptent le roman de Joseph Kessel. La Passante du Sans-Souci, du nom d’un bistrot parisien où se retrouvent les émigrés allemands, a été publié en 1936 et préfigure l’horreur proche du nazisme et des camps de concentration. Elsa Wiener – interprétée par Romy Schneider –, exilée à Paris avec un jeune garçon juif, fait tout son possible pour faire libérer son époux, Michel, enfermé dans un camp.

Jacques Rouffio imagine une adaptation du roman reliée aux tragédies contemporaines et aux atteintes des droits de l’homme. Partant du présent, les années 1980, pour remonter dans le passé, en rappelant l’époque effroyable du nazisme, il fait prendre conscience que les assassins fascistes ont désormais de nouveaux visages. « Ce qui existe, existe encore. Le racisme n’est pas éteint. Il faut rester vigilant. Telle est la morale de ce film dont la résonance n’en finit pas, hélas, d’être contemporaine. L’actualité toujours nous rattrape. » (Jacques Rouffio)

La Passante du Sans-Souci, au-delà de son sujet, est une œuvre marquante : il s'agit de l’ultime interprétation de Romy Schneider, disparue seulement un mois après la sortie du film. Un chant du cygne pour celle qui demanda qu'il soit dédicacé ainsi : « À David et son père », David, son fils, décédé avant le début du tournage, à seulement 14 ans et son père, Harry Meyen, Juif allemand et ancien déporté. Il y a tout, dans l’interprétation de l’actrice, la peur, le chagrin, et par-dessus tout un courage admirable. « Romy avait choisi de porter le fer brûlant dans la plaie » (Jacques Rouffio)