Lorsque les deux scénaristes, Jean Aurenche et René Wheeler, commencèrent à écrire Les Amants du pont Saint-Jean en 1945, aucun d’entre eux n’avaient entendu parler du néoréalisme italien. C’est Aurenche, enfant de la Drôme, qui influença largement l’histoire, inspirée du court métrage Les Pirates du Rhône qu’il avait réalisé en 1933. Pour Noël Herpe, plus que de néoréalisme, il s’agit ici de « néohumanisme à la française ».
Les Amants du pont Saint-Jean est un film aussi inclassable qu’insolite, naviguant entre comédie de mœurs et drame puissant. Decoin trace ici le portrait d’un couple de vieux amants qui s’aiment comme au premier jour. Les rôles titres sont originaux car il ne s’agit pas de jeunes premiers. Gaby Morlay est une coquette clocharde, et Michel Simon un vieux provocateur, qui exècre, au choix selon les jours, les conventions, les institutions et la police. En creux pour le cinéaste, le portrait d’une France provinciale, étriquée et petite-bourgeoise.
Farce noire acerbe et corrosive, le film eut un succès très modéré lors de sa sortie. Il s’agit pourtant d’un des plus bouleversants mélodrames de l'après-guerre. Les Amants du pont de Saint-Jean a été remis en lumière par Bertrand Tavernier lors d’une carte blanche au cinéma L’Arlequin à Paris : « ‘Insolite, l’intrigue ne l’est pas moins par son caractère constamment imprévisible. Sinueuse, comme le fleuve qui lui sert d’inspiration, elle déroule le cours de destinées baroques, obéissant à une logique plus profonde que celle de la psychologie.’, note très justement Jacques Lourcelles. Ces qualités, que l’on trouvait dans l’étonnant Retour à l’aube, montrent bien que derrière la modestie discrète de Decoin, il y avait un esprit ouvert, prêt à toutes les expériences, un cinéaste souple, curieux, nullement prisonnier des genres qui avaient fait son succès. » (Bertrand Tavernier)
Les Amants du pont Saint-Jean
France, 1947, 1h34, noir et blanc, format 1.37
Réalisation : Henri Decoin
Scénario :Jean Aurenche, René Wheeler
Dialogues : Jean Aurenche
Photo : Jacques Lemare
Musique : Henri Verdun
Montage : Yvonne Martin
Décors : Émile Alex
Production : Gustave Jif, Adolphe-Abraham Landeau, D. U. C.
Interprètes : Michel Simon (Alcide Garonne), Gaby Morlay (Maryse), Nadine Alari (Augusta Boiron), Marc Cassot (Pilou), René Génin (Labique), Paul Frankeur (Georges Girard), André Darnay (Amédée Boiron), Pauline Carton (Marguerite Boiron), Pierre Darteuil (Rival), Camille Guérini (le brigadier), Albert Rémy (un parent du noyé), Madeleine Suffel (une parente du noyé), Odette Barencey (Amélie), Geneviève Morel (la bonne)
Présentation au Festival de Cannes : septembre 1947
Sortie en France : 24 décembre 1947
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