Nana

Version dépouillée du roman de Zola, Nana est le deuxième long métrage de Jean Renoir, un hommage à Folies de femmes d’Erich von Stroheim  - que le cinéaste dit avoir vu une dizaine de fois à sa sortie. Il voue en effet une admiration sans bornes au réalisateur qu’il fera d’ailleurs tourner dans La Grande Illusion en 1937. Il croit à la possibilité de transposer dans le cinéma français son style, fait de réalisme et d’expressionnisme. Mais aussi de proposer au public le grandiose américain, en réaction au  film français de l’époque qu’il juge "artistique" et ennuyeux.

Nana est la première réalisation importante du cinéaste et le plus ambitieux de ses films muets. Cette coproduction avec l’Allemagne (studios de Grünewald) est tournée avec d’importants moyens techniques. Si cette superproduction connaît un échec commercial qui oblige Renoir à vendre, à regret, quelques toiles de son père, elle lui permet d’entrer dans le métier en professionnel.

Il faut souligner la reconstitution méticuleuse de la fin du Second Empire, d’une fascinante qualité plastique, grâce aux décors et costumes créés par Claude Autant-Lara qui « entoura [sa] mise en scène d’un cadre somptueusement décadent où l’authenticité se mariait avec la fantaisie. » (Jean Renoir, Ma vie et mes films, Flammarion). Un décor à la hauteur de la beauté de son épouse et muse Catherine Hessling, qui reste au cœur de son œuvre.

« Par réaction probablement contre le "guindé" de son film précédent, Renoir se rapproche ici des personnages, filmés constamment en plans américains. […] On trouve dans Nana ce qui deviendra la thématique de Renoir : l’amour du spectacle, la femme qui se trompe sur sa vocation, la comédienne qui se cherche, l’amoureux qui meurt de sa sincérité, le politicien éperdu, l’homme créateur de spectacles. Bref, Nana rime avec Elena. » (François Truffaut, in  Jean Renoir, André Bazin, Éd. Ivrea)