Programme de courts métrages : Les Ruses de Malec, Frigo capitaine au long cours, Les parents de ma femme

Depuis 1917, Buster Keaton tourne des courts métrages pour la Comique Film Corporation, aux côtés du célèbre Roscoe "Fatty" Arbuckle. Lorsque Fatty est engagé par la Famous Players-Lasky Corporation pour devenir la vedette de longs métrages, le producteur Joseph M. Shenck, cofondateur de la Comique Film, propose à Buster Keaton de devenir son acteur principal et le coréalisateur de ses propres films. Celui-ci s’installe alors dans les anciens studios Chaplin, rebaptisés Studios Keaton. Dans la plus grande indépendance, il rassemble autour de lui une équipe réduite, mais enthousiaste. Entre 1920 et 1923, il coréalisera près de vingt courts métrages, parfois à un rythme de six par an !

En 1920, il réalise Les Ruses de Malec (The Scarecrow), qui s’inscrit dans la lignée de ses films-poursuites. Soutenant un rythme constant, il se débat avec son colocataire, un chien, une batteuse à foin, le père de la jeune fille, un épouvantail… Fasciné par l’automatisation de la maison et champion de la mise en scène d’objets, Keaton signe ici une magnifique scène de déjeuner-ballet. Ingéniosité, humour, géométrie des espaces sont au rendez-vous.

Un an plus tard, avec Frigo capitaine au long cours, Keaton et Cline réalisent un court sombre et pessimiste. Le héros a un seul but, la croisière familiale. L’entreprise, vouée à l’échec, ne l’empêche pourtant pas de se battre. Et pour la première fois chez Keaton, le voyage ne finit nulle part. Pour Jean-Pierre Coursodon, « le comique en est splendide, mais également terrifiant tant la marge qui le sépare du drame est étroite. » (Buster Keaton, Seghers).

Enfin, dans Les Parents de ma femme, un homme se retrouve marié - par un juge qui ne parle que polonais - à une femme peu commode, dont la famille s'avère aussi particulièrement odieuse qu'envahissante. Certains y verront une satire de la vie conjugale de Keaton, marié depuis peu avec Natalie Talmadge, et, de fait, avec son clan. Keaton et Cline utilisent la comédie pour décrire une nature humaine d’une rare noirceur. Seul le départ final du héros pour Reno, capitale du divorce, offre enfin le souffle d’air tant espéré.